[PAROLE D’EXPERT] « Détecter et révéler les projets structurants pour les investisseurs touristiques et les territoires »
Spécialisé dans le développement de projets touristiques, Arnaud Besset accompagne les territoires dans la promotion de leurs offres foncières et immobilières auprès des investisseurs et porteurs de projets. Sa mission : orienter les enseignes nationales et les porteurs de projet(s) indépendants vers les sites les plus adaptés à leur développement.
Pourquoi tant de territoires ont fait du tourisme un enjeu majeur de leur développement ?
Le tourisme est un secteur majeur de l’économie française. Il représente environ 8% du PIB et s’avère, surtout, une source d’emplois durables et non délocalisables. Avant la crise, on estimait que le tourisme employait – en moyenne – un peu plus de 2 millions de salariés, dont 1,4 millions d’emplois directs. La pandémie a, certes, mis un coup de frein brutal au secteur avec la destruction de près de 240 000 emplois mais, aujourd’hui, les perspectives sont de nouveau au beau fixe et on estime qu’il sera revenu à son niveau d’avant crise dès 2022. Il est donc indispensable, dès maintenant, de se structurer pour répondre aux attentes d’une clientèle qui a fortement évolué au cours des deux dernières années.
Arnaud Besset, responsable pôle Tourisme – Geolink Expansion
Quel bilan tirer de la crise ? Œnologie, cyclotourisme, RSE… la pandémie semble avoir rapproché les voyageurs des territoires qui ont fait de l’authenticité leur marque de fabrique ?
Les arrivées de touristes internationaux en France ont chuté de 93% en 2019. Pour la 1re destination touristique internationale – en nombre de visiteurs – cela aurait pu être une véritable catastrophe. Heureusement, le bilan est plus mitigé car certains territoires, plus en phase avec la situation et les nouvelles attentes des voyageurs, sont parvenus à tirer leur épingle du jeu et sont parvenus à capter une clientèle nationale qui a fait le choix – et ce n’était pas une évidence – de maintenir ses vacances et de privilégier des destinations de proximité. Les beaux résultats enregistrés localement cet été et lors de l’arrière-saison confirment d’ailleurs que ce n’est pas un effet de mode mais bien une tendance qui devrait s’inscrire dans la durée.
Quels territoires sont parvenus à tirer leur épingle du jeu ?
Certains territoires ont toujours eu un ADN touristique très fort ne serait-ce que parce qu’ils ont des écosystèmes naturellement attractifs que ce soit en lien avec leur patrimoine ou des investisseurs qui ont, par exemple, développés des parcs de loisirs ou des structures susceptibles d’attirer les voyageurs. En ce qui concerne les territoires ruraux, la crise n’a fait qu’accentuer un mouvement déjà à l’œuvre depuis plusieurs années et qui se caractérise par une désaffection des grandes métropoles surpeuplées au profit de ce qu’on pourrait appeler un retour à la terre avec une gamme d’activités plus en lien avec les grands espaces et la nature. L’écotourisme, les circuits courts… sont plébiscités par les porteurs de projet qui souhaitent satisfaire une nouvelle clientèle. Une tendance parfaitement conforme aux données recueillies par nos équipes auprès des investisseurs : + 13% œnotourisme, + 11 % slow Tourisme, + 7% cyclotourisme…
Le cyclotourisme, une tendance qui séduit de plus en plus de français.
Pouvez-vous nous donner plus de précisions sur ce que recherchent les investisseurs ?
Plusieurs phénomènes se juxtaposent. L’hôtellerie de plein air est ainsi en pleine expansion mais, le bord de mer étant fortement saturé, cela ouvre des opportunités aux territoires situés à la campagne ou à la montagne… à condition d’avoir anticipé, via par exemple des révisions du PLU, et de disposer de parcelles ou de fonciers à même d’accueillir ces projets. D’autres investisseurs – bien conscients des difficultés en lien avec une implantation sur un site protégé – revoient, eux, leur concept pour proposer des structures sans fondation et/ou démontables qui s’intègrent facilement en pleine nature. Dans tous les cas, il est indispensable pour le territoire de travailler sur l’urbanisme et l’identification de parcelles qui pourront être proposées aux futurs investisseurs. En parallèle, il faut mener un travail de fonds auprès des opérateurs et des institutionnels locaux type CCI voire directement des professionnels locaux et privés pour avoir une bonne connaissance des éventuelles cessions en cours ou à venir sur le territoire.
Si ce travail d’identification des offres touristique parait primordial, il semble également particulièrement complexe ?
Je n’aurai besoin que d’un chiffre pour démontrer le caractère indispensable de ce travail : 80% des porteurs de projet touristiques passent, aujourd’hui, par internet pour dénicher des biens. Les 20% restants sont des professionnels aguerris qui font marcher leur réseau pour des opérations stratégiques bien souvent « off-market ». La complexité réside, dès lors, dans le décalage entre le volume de demandes et le volume d’offres identifiées. Chez Geolink Expansion, nous nous efforçons d’intervenir très en amont du processus pour aider les élus et les développeurs économiques à repérer et packager les offres qui peuvent bénéficier d’un vrai potentiel en matière de tourisme, de culture ou de loisirs.
Comment procédez-vous pour révéler ces sites dans les territoires ?
Le réseau mis en place avec les acteurs privés du secteur nous permet d’avoir une bonne visibilité des potentielles opportunités et ainsi de remonter certaines annonces que les collectivités n’arriveraient pas toujours à capter seules. Nous nous appuyons également sur la relation tissée avec nos clients pour faciliter la mise en relation avec les investisseurs et évaluer très rapidement le potentiel d’un site sur une thématique donnée. Notre expertise et notre connaissance des pré-requis techniques constituent également un atout majeur pour l’ensemble des parties prenantes qui savent que si la mise en relation est effectuée, c’est que le projet a réellement une chance d’aboutir.
Quelles filières sont à même de connaître les meilleures opportunités de croissance ?
Les résidences de tourisme et l’hôtellerie principalement haut de gamme ont été fortement impactées par la crise. Une étude d’EY publiée, au mois d’octobre, annonçait jusqu’à 60% d’investissement en moins sur le secteur. Même si ce phénomène ne devrait être que temporaire, le potentiel à court terme de ce secteur – porté par une clientèle internationale – devrait être limité à court terme. Plus paradoxal, le tourisme lié au patrimoine, à la culture et aux gites ruraux – qui a plutôt supporté la crise – ne devrait pas connaitre un développement spectaculaire lié notamment au nombre de biens sur le marché qui reste, par essence, relativement stationnaire. Les meilleures perspectives sont, aujourd’hui, offertes par l’hôtellerie de plein air et les villages vacances qui répondent à la fois aux aspirations des voyageurs mais aussi à celles des investisseurs qui privilégient désormais le glamping au camping et proposent des concepts 4 saisons à la fois confortables, modernes, écoresponsables et pleinement intégrés à leur environnement qu’ils mettent à profit pour proposer des excursions ou des randonnées à des voyageurs souhaitant renouer avec la nature.
La Nouvelle-Aquitaine propose de véritables chasses au trésor sur l’ensemble du territoire.
Des conseils pour les territoires qui souhaiteraient profiter pleinement de cette nouvelle donne ?
Actuellement, on constate une très forte hausse de la demande en lien avec les loisirs de plein air : via ferrata, accrobranches, cyclotourisme, randonnée… l’innovation n’est pas en reste avec des concepts autour de la réalité augmentée qui permet d’offrir une expérience unique aux voyageurs sans dénaturer le paysage. Dans la région Nouvelle Aquitaine, par exemple, ce sont près de 400 sites qui bénéficient de ce système pour offrir une immersion unique aux voyageurs et leur proposer de longs périples ou de véritables chasses au trésor à travers le territoire… avec un réel impact en termes de nuitées mais également en ce qui concerne la structuration de l’offre avec le développement d’un réel écosystème incluant réseaux de transport, chambres d’hôtes, établissements hôteliers, restaurateurs qui deviennent à la fois partenaires et acteurs de l’évènement. Enfin, l’hôtellerie de plein air offre un potentiel de développement indéniable. En 2021, on dénombre environ 7 000 établissements dont environ 20% seulement sont détenus par des acteurs nationaux. Une marge de progression considérable avec de belles opportunités que ce soit en termes de concept ou de respect de l’environnement (labels, démarche RSE, etc.) tout en fait en adéquation avec les attentes actuelles.