[LOGISTIQUE] Région Grand-Est, le regard tourné vers l’international
De la crise de la sidérurgie au leadership dans le secteur de la logistique, la région Grand-Est a su tirer profit d’une localisation géographique particulièrement privilégiée. Jean-Michel Strasbach, chef de projet Senior pour l’agence Invest Eastern France nous en dit plus sur la stratégie d’un territoire et ses ambitions pour les années à venir.
Pourquoi avoir fait de la logistique un des grands axes de développement du territoire ?
C’est dans les années 80 que le Grand Est s’engage véritablement dans le domaine de la logistique. Son implantation privilégiée à la croisée de 5 pays européens : la Suisse, l’Allemagne, le Luxembourg, la Belgique et, bien sûr, la France offre au territoire un positionnement stratégique. La qualité et le développement des infrastructures avec trois autoroutes, la A35, la A31 et la A4, un réseau ferroviaire de premier plan et la présence du Rhin ainsi que de la Moselle propice au transport fluvial ont contribué au succès du territoire dans ce domaine en connectant le territoire aux ports de la mer du Nord, notamment Rotterdam et Anvers et en ont fait une plateforme incontournable aussi bien au niveau national que continental. Les gens l’ignorent souvent mais Mulhouse est, par exemple, plus proche de Milan que de Paris !
La crise sanitaire n’a pas affecté le dynamisme du secteur sur le territoire ?
Au contraire, sous l’effet du développement du e-commerce, le secteur a connu une croissance sans précédent. Pour implanter sa plus grande plateforme logistique en France, c’est le Grand Est et Metz que le géant du commerce en ligne, Amazon, a choisi. Implanté sur l’ancienne base aérienne de Frescaty, ce nouveau site permettra plus de 1 000 embauches en CDI sur trois ans. Fin 2020, c’est Huawei qui a rejoint l’Alsace en implantant non seulement une base logistique mais également un site de production de solutions technologiques de réseaux mobiles pour plus de 200 millions d’euros d’investissement. Situé à Brumath, à une dizaine de kilomètres de Strasbourg, le site permettra l’embauche d’un peu plus de 300 personnes. Deux implantations qui sont symboliques du travail de prospection mené par les équipes d’Invest Eastern France. Il nous a néanmoins fallu repenser notre métier pour répondre aux défis de la crise sanitaire. Une remise en question de nos méthodes de travail qui nous a conduit à imaginer de nouveaux outils digitaux : visite virtuelle… qui soient en mesure de répondre aux attentes de nos interlocuteurs.
Jean-Michel Strasbach, Senior Investment Advisor – Invest Eastern France
D’autant plus quand, comme le territoire, on porte une attention toute particulière aux acteurs internationaux ?
Les atouts du Grand Est dans le domaine de la logistique sont parfaitement connus des entrepreneurs français et européens. Il nous revient donc de faire connaitre les points forts du territoire au-delà de ce périmètre géographique. Nous ne visons pas uniquement les grands groupes mais aussi des entreprises de taille plus modeste qui pourront tirer profit de la plurimodalité développée au fil des années par le Grand Est. A titre d’exemple, on peut citer le cas de cette entreprise indienne qui nous a récemment rejoint et qui profite du Rhin pour se faire livrer un container mensuel ; pour d’autres entreprises qui ont des délais plus serrés « Just in time », le train voire le classique transport routier sont autant d’alternatives.
Et si on parlait innovation ?
Drones, collecte des datas, cybersécurité, Internet des objets, transition écologique… le secteur de la logistique est l’un des plus innovants. La crise sanitaire a d’ailleurs rappelé toute l’importance de la supply chain et l’impérieuse nécessité de bien maitriser les circuits d’approvisionnement. Le territoire organise de nombreux appels à projets pour favoriser et promouvoir les initiatives dans ce domaine. En début d’année, les French Tech Tremplin Incubation ont permis notamment de faire émerger le projet Towbe Bike qui entend – avec sa remorque électrique à trois roues pour vélo – révolutionner la livraison des courses et apporter une réponse au casse-tête du dernier kilomètre. Le groupe LOHR INDUSTRIE, implanté à Duppigheim, travaille également sur cette question avec un véhicule bimodal sans chauffeur 100% électrique. Baptisé Cristal, ce bus d’un nouveau genre est conçu pour rouler pus de 600 000 kilomètres et devrait coûter 20% moins cher qu’un bus électrique. Dans le domaine fluvial également, le territoire travaille main dans les mains avec les entrepreneurs innovants pour développer des solutions adaptées au enjeux du territoire comme la transition écologique. Nous travaillons, par exemple, sur un projet de barge à hydrogène disposant d’une coque hydro-dynamique. La conduite automatique en ville est également un projet que nous suivons de près. Bref, il va sans dire que l’innovation est au cœur même de notre réflexion.
Pourriez-vous nous en dire plus sur la stratégie du territoire dans le domaine logistique pour les prochaines années ?
Les marchés nord-américains et asiatiques constituent l’une de nos priorités. Prospection, acculturation et force de persuasion sont nos meilleurs outils pour convaincre les acteurs du marché de venir s’implanter sur le territoire s’il souhaite se développer sur le marché européen. C’est d’ailleurs ce qui ressort d’une récente étude du cabinet PWC qui souligne que pour se disperser dans le reste de l’Europe, l’endroit le plus stratégique se situe dans une zone de 50 kilomètres autour de Strasbourg. Un argument supplémentaire pour convaincre nos interlocuteurs que c’est dans le Grand-Est qu’il faut s’implanter pour partir à la conquête du marché européen.